UNE VOYAGEUSE DE COMMERCE
Au mois d'avril 1893, mes affaires m'amenèrent à demeurer quelque temps à l'hôtel de Devonshire Arms à Skipton, dans le Yorkshire. J'avais alors vingt-trois ans et je débutais assez modestement dans la carrière de représentant de commerce, pour la société Josiah Westerman and Sons, Fournisseurs de Maroquinerie et de nouveautés. Il ne sera guère question de mon emploi dans ce récit car, même alors, ce n'était pas ma principale préoccupation, mais il contribua, d'une façon bien peu glorieuse, à précipiter le cours des événements qui sont le sujet de cette histoire.
Le Devonshire était un hôtel de voyageurs en brique grise, aux corridors mal éclairés et pleins de courants d'air, aux sombres boiseries et aux peintures écaillées. La seule pièce agréable était le salon, bien qu'exiguë et encombrée de meubles - les fauteuils rembourrés de crin étaient si rapprochés qu'il était difficile de se frayer un passage entre eux -elle était chaude en hiver et présentait l'avantage d'être éclairée au gaz, alors que dans les chambres l'unique source d'éclairage était de vieilles lampes à pétrole nauséabondes.
Ce soir-là, j'avais fait une courte promenade après le dîner puis, à mon retour, j'étais monté me changer dans ma chambre et j'étais descendu au salon.
Trois voyageurs s'y trouvaient déjà, que je saluai.