 de Ian McDonald Livre
de poche nº 7168 (1994) Isbn : 2-253-07168-4 [Préface],KLEIN
Gérard [Couverture],MANCHU [Traduction],SIGAUD Bernard
LAFFONT, Coll. Ailleurs et demain 1989
Prix Locus 1989 (premier roman)
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4e de couverture Mars se réveille. Jusqu'au fond du bout du pire désert martien où le docteur
Alimantado décida de s'installer après avoir bu sa dernière goutte d'eau, et
qu'il appella Desolation Road. Là le rejoignirent par accident des
personnalités aussi singulières que Persis Tatterdemalion, pilote sans avion et
tenancière du premier bar, Rajandra Das qui répare les machines d'une caresse,
Paternoster Jericho, haut dignitaire du crime, qui fuit ses
assassins. Et d'autres, et d'autres encore, tous plus étranges, tous
plus humains. Ils connaîtront la pluie sur Mars, et le pouvoir de
ROTECH la transplanétaire, et la Sainte de Tharsis, et la guerre, et les
tempêtes du temps déclenchées par le docteur Alimantado. Voici le plus
beau livre sur Mars depuis les Chroniques Martiennes de Ray Bradbury. On l'a
comparé à Cent Ans de solitude de Gabriel Garcia Marquez.
Mon avis : Que voila un livre surprenant
! Il est absolument impossible de le résumer tant il foisonne
de personnages et d'actions .Ce n'est pas de la "Hard SF"
martienne, à tout dire le décor martien est un prétexte
et le récit pourrait se dérouler partout ailleurs
et si ce n'est les concessions technologiques relevant de la SF
à n'importe quel époque . Les petits hommes verts
de Ian McDonald sont des hommes du futur qui se sont intégrés
au végétal, trés joli clin d'oeil à
Burroughs . A lire
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Préface
de Gérard Klein (pour l'édition en Livre de Poche) Vous ne le savez pas encore, mais Desolation Road
se trouve sur Mars. Mars est un endroit très spécial qui
représente pour l'auteur et l'amateur de Science-Fiction
quelque chose comme Jérusalem, Rome, La Mecque
et Lhassa superposés. Un écrivain qui
n'y a pas fait au moins un pèlerinage, fût-ce
sous la forme d'une brève nouvelle, ne peut pas
être considéré comme de stricte
obédience. Il doit être traité avec
sympathie et bienveillance, mais avec prudence. Les
excuses qu'il pourrait bredouiller, sous le prétexte
que le lieu est trop fréquenté et qu'il
a même été atteint en 1976 par des
sondes Viking qui l'auraient dépoétisé,
ne seront pas acceptées. D'après Camille Flammarion, Pierre Versins
et Peter Nicholls, qui se citent probablement en série,
le premier touriste littéraire de Mars serait
Athanase Kircher dans son Voyage extatique
de 1656. C'est possible, mais ce n'est nullement certain.
De toute façon, il s'agit d'un voyage plus mystique
que technologique, qui sera réédité
par Emmanuel Swedenborg (1758). Les procédés
singuliers de transfert ne manqueront du reste jamais :
le héros d'Uranie, de Camille Flammarion
(1889) s'y transporte comme en rêve ; comment
l'Œuf de cristal, de H.G. Wells (1897),
s'est-il retrouvé sur Terre dans la boutique
d'un antiquaire pour permettre à un amateur d'observer
dans ses profondeurs des paysages martiens ? Un
peu plus tard, John Carter, le héros d'Edgar
Rice Burroughs se rendra sur Barsoom, ainsi que l'appellent
ses habitants selon lui, par la seule force de la volonté
(1912). Un explorateur plus crédible de Mars est George
Griffith (1857-1906), le grand prédécesseur
de Wells et que l'on pourrait peut-être rapprocher
un peu de notre Jules Verne par son goût des voyages.
Il s'en distingue nettement par des préoccupations
sociales et prospectives qui mériteraient d'être
réexaminées. Assez médiocre écrivain,
totalement supplanté par H.G. Wells, il demeure
presqu'inconnu en France, sans doute injustement. Je
dois avouer l'avoir très peu lu jusqu'ici. Un
autre visiteur notable est l'allemand Kurt Lasswitz,
dont le Sur deux planètes (1897)
a inspiré l'astronautique allemande. N'oublions
surtout pas les Navigateurs de l'infini
de Rosny aîné (1925) dont la seconde partie,
les Astronautes, présente la double
singularité de relater une grande histoire d'amour
entre une Martienne et un Français, appartenant
pourtant à des espèces très différentes,
et de n'avoir été publié, à
titre posthume, qu'en 1960, dans "Le Rayon Fantastique" ;
ni l'étonnante Aelita ou le Déclin
de Mars (1923), sauvée par une révolution
prolétarienne, et l'admirable une Odyssée
martienne de l'américain Stanley Weinbaum
(1934), exemplaire dans sa description d'une écologie
radicalement étrangère. L'une des plus
belles réussites dans la création d'un
monde étrange et séduisant est due au
théologien C.S. Lewis dans son splendide le
Silence de la Terre (1968) où les Martiens
sont naturellement éthiques et même chrétiens. On comprendra que j'ai choisi de ne citer ici que
des auteurs ou des textes un peu singuliers car on pourrait
emplir un volume entier avec les découvertes
successives de Mars. Comme on sait, les voyages ne se sont pas faits à
sens unique. Wells, toujours lui, introduit l'impérialisme
interplanétaire dans la Guerre des mondes
(1898), thème qui aura beaucoup de succès,
notamment au cinéma, tant les Terriens naturellement
pacifistes furent éberlués par ces mauvaises
manières. La proximité relative de la planète
Mars et la qualité des observations effectuées
à l'aide d'instruments relativement primitifs,
ont évidemment joué un grand rôle
dans cette familiarité. La minutieuse description
de “canaux” par l'astronome italien Schiaparelli, à
partir de 1877, relancée par l'ouvrage de l'américain
Percival Lowell, Mars (1896), y contribua
considérablement. Au début des années
1950, on pouvait lire encore dans Astounding Science-Fiction
un article sérieux et documenté qui cherchait
à établir l'artificialité de ces
structures à partir d'une analyse topologique
irréfutable. Malheureusement, les Martiens prirent
soin d'en effacer apparemment toutes les traces et d'évacuer
la planète avant que les premières sondes
d'observation ne survolent leur planète. Quelques
auteurs tout à fait postérieurs et bien
documentés, comme Greg Bear dans l'Envol
de Mars (1993), ont cependant suggéré
qu'on retrouverait sans grande difficulté ces
ouvrages d'art sous la couche de sable qui nous les
masque. Bear, et bien d'autres auteurs avant lui, sans négliger
quelques groupes d'études de la NASA, ont fortement
insisté sur l'idée qu'il serait regrettable
de laisser perdre un monde aussi accueillant et ont
donc suggéré de terraformer Mars, c'est-à-dire
de lui rendre une atmosphère respirable (par
nous) et d'y réinstaller les océans et
la végétation que nous trouvons confortables. Il a certainement fallu un certain courage à
Ian McDonald pour s'inscrire en 1988 dans cette riche
tradition, qui plus est dans son premier roman. Il y
a parfaitement réussi. Peut-être parce
qu'il y a transporté les accents du Cent
ans de solitude de Gabriel Garcia Marquez, l'un
des chefs-d'oeuvre de la littérature hispano-américaine. Sans renier cette source, Ian McDonald a indiqué,
dans un entretien, qu'il avait été également
inspiré par les Chroniques Martiennes
de Ray Bradbury (1950) qui s'était dit porté
lui-même par Barsoom, la Mars d'Edgar Rice Burroughs,
épique, naïvement lyrique, délicieusement
détachée de toute vraisemblance. Il n'y
a, à première vue, pas grand rapport entre
ces trois œuvres. Mais elles ont tout de même
quelque chose en commun : comme si Mars était
un sujet trop vaste, un réservoir d'images et
de fantasmes trop riche pour être épuisé
en une seule rencontre, elles ont toutes pris la forme
de chroniques, réparties entre une douzaine de
romans chez Burroughs, égrenées sous forme
de nouvelles par Bradbury, distribuées entre
des points de vue différents et presque autonomes
sur le clavier de McDonald. Il y a d'autres rencontres
ténues mais significatives entre les deux derniers
auteurs : les Martiens, qui ont peut-être,
ou peut-être pas, disparu sous le rouleau compresseur
de la civilisation terrienne ; le remodelage ou
encore la terraformation de la planète rouge
qui culmine ici et là dans une éruption
d'arbres et de végétation, due à
Johnny Pépin de Pomme chez Bradbury, à
la musique de la pluie chez McDonald. Ce dernier a du
reste parfois renoué avec le ton bradburyen sans
que l'on puisse dire exactement s'il a replacé
sans effort ses pas dans la trace du grand homme ou
s'il s'agit d'un hommage calculé. Mais les résonances
s'arrêtent là. Ce qui est le plus frappant dans la comparaison entre
ces trois œuvres, c'est leur disparité dans l'approche
de la vraisemblance, disons scientifique. Burroughs
n'en recherche aucune ; sa Barsoom pourrait se
trouver n'importe où, à l'intérieur
de la Terre, du côté de Pellucidar,
ou bien dans une autre galaxie, ou plutôt nulle
part ; son unique point d'attache au réel
astronomique est la présence de deux petites
lunes. Bradbury feint de s'entourer de plus de précautions ;
le désert, quelques noms, les fusées,
en somme un léger nimbe de réalisme qui
ne fait pas illusion. McDonald s'efforce beaucoup plus
à la vraisemblance, même s'il ne cache
pas qu'il joue ; en fait, il choisit de parsemer
son roman de détails très discrets qui
signalent au connaisseur qu'on est bien sur Mars. Cette
évolution est intéressante. Elle indique
qu'en un peu moins d'un siècle, Mars a échappé
à l'arbitraire total, que nos représentations,
sans cesser d'être poétiques, vont nourrir
leurs images, de plus en plus, du côté
de la science. La tendance est encore plus affirmée
chez Kim Stanley Robinson qui décrit lui aussi
la terraformation de Mars en trois romans (encore une
chronique), Mars la Rouge, Mars la
Verte et Mars la Bleue (1992, 1993,
1994). Ainsi les évocations de la planète
Mars, notre vieille complice en imaginaire, symbolisent
à merveille l'évolution de toute la Science-Fiction
vers l'assimilation de la science par la littérature.
Et c'est très bien ainsi.
Gérard Klein |
Dans le pire désert , il y a un coin plus perdu que les
autres. Le docteur Alimantado qui l'atteignit par accident, le baptisa
Desolation Road. II sera rejoint par une série de personnages
baroques,comiques, excentriques, qui ont pour lot commun d'être
marginaux, à la dérive, à côtè
de la plaque, oubliés du destin et en quelque sorte dépourvus
d'avenir. On rencontre à Désolation Road des personnalités
aussi singuliéres que Persis Tatterdemalion, pilote d'élite
clouée au sol qui devient la tenancière du premier
bar; Rajandra Das, vagabond du rail, que les machines aiment tant
qu'il les répare d'une caresse ; la grand-mére Babouchka
qui rêve d'un dernier enfant - conçu et élevé
dans un bocal ; Paternoster Jericho, des Familles Exaltées,
haut dignitaire du crime organisé qui fuit ses assassins
;Ed, Louie et Umberto Gallacelli triplés qui se ressemblent
tant qu'ils aiment et épousent la même femme. Et
d'autres, et d'autres, et d'autres, descendants,nouveaux Martiens,
sainte ,pélerins, militaires, terroristes, réunis
sous la houlette du fondateur involontaire de Desolation Road, le
docteur Alimantado, chronodynamicien génial, qui disparaîtra
dans les couloirs innombrables du temps pour sauver sa ville. " Desolation Road est une oeuvre littéraire majeure
, un roman de science-fiction qui fera fondre même ceux qui
détestent la science-fiction ! II y a dans ce livre exultant
et exaltant ,picaresque, baroque, pittoresque et rigoureux, autant
de poésie que dans Les Chroniques martiennes de Bradbury,
de sens du bizarre que dans Cent ans de solitude de Gabriel Garcia
Marquez, d'ironie sociale que chez Huxley, Orwell et Sheckley, d'inventions
technologiques à la fois sérieuses et burlesques que
chez Clarke ou Asimov, et de défi à la réalité
que chez Dick. "
GÉRARD KLEIN
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